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Pratiquer le Bouddhisme

< Le plaisir, quand il se prolonge se métamorphose en souffrance

La souffrance quand elle se prolonge ne se métamorphose jamais en plaisir. > Aryadeva

His Holiness the Dalai Lama looking out at the view of Leh Valley from Zangdok Palri Monastery in Ladakh, J&K, India on August 7, 2016. Photo/Tenzin Choejor/OHHDL www.dalailama.com

Pratiquer une philosophie spirituelle comme le bouddhisme, c’est cultiver son mental. En langue tibétaine, « religion » se dit chö (tcheu), qui signifie adapter, se perfectionner, progresser. Au fond, elle repose sur la transformation de ce qui est à l’origine de la souffrance pour triompher de nos comportements incorrects. Le terme sanskrit qui correspond à « religion » est dharma, qui a le sens de « maîtriser » : se protéger d’une souffrance inopportune en créant des antidotes contre les causes de cette souffrance. Par exemple, en adoptant la règle de conduite vertueuse de ne pas tuer, vous évitez de commettre un homicide, ce qui protège des effets qu’il engendre, comme une renaissance malheureuse, une brève existence et bien d’autres.

 

Par la pratique, vous développez des antidotes contre les actes non vertueux du corps, de la parole et de l’esprit. Et ainsi, vous vous protégez des souffrances dont ils auraient pu être l’origine. La religion sous cet aspect comprend autant les antidotes aux émotions négatives que la libération de ces émotions destructrices et leurs effets. Voilà le fondement de la religion bouddhiste.

 

Comment transformer nos comportements ? Ce ne sont pas les lois, la police ou l’armée qui peuvent nous y contraindre. Rappelez-vous, les tentatives d’imposer le marxisme et le léninisme aux peuples chinois et russes, ont échoué. Alors comment cette transformation s’accomplit-t-elle ? Par un courage volontaire, enthousiaste et profond. Des forces extérieures peuvent ponctuellement contrôler des agissements physiques ou verbaux. Comme cet élève à la langue bien pendue, tenu en respect par un professeur irascible. Cependant, le changement durable ne vient pas de l’emprise extérieure qui est inefficace, seul votre intérêt personnel peut le générer.

 

Pour trouver une telle motivation, il faut percevoir l’importance du changement et l’inanité de la permanence. En définitive, comprendre qu’être sous l’emprise d’un mental non maîtrisé provoque à court terme des inconvénients, et à long terme favorise assurément la souffrance. Alors qu’un mental discipliné apporte rapidement le bonheur et des bienfaits importants avec le temps, pour vous et votre entourage. Les désavantages issus d’états d’esprit indisciplinés, bien perçus, vous pourrez les combattre. Les avantages tirés d’attitudes disciplinées, bien discernées, vous serez naturellement enclin à les pratiquer. Ces choix s’effectuent à l’aide de la pensée analytique.

 

La nécessité d'un point de vue impartial

 

Pour analyser avec succès quelque chose, l’impartialité est indispensable. Avec des préjugés, les idées préconçues dans un sens ou dans un autre vont fausser dès le début les résultats de l’analyse. Pour commencer, il faut être libéré des notions de bien ou de mal, et, bien plus encore, avoir la volonté d’entretenir la possibilité que chaque idée puisse être juste ou erronée. Une analyse impartiale rend possible une perception des aspects négatifs et positifs.

 

Tsongkhapa, sage tibétain de la fin du XIV siècle et du début du XV siècle, dit : « Si vous êtes subjectif, les préjugés vous condamnent à ne pas percevoir les vrais avantages. » L’impartialité est donc cruciale, comme une volonté d’affronter la réalité d’une situation telle qu’elle se présente. Le doute est une phase utile, car il amène le questionnement, qui pousse à l’analyse. De l’analyse se dégage la vérité et ce qui est faux tombe dans l’insipide. Avec le doute, on s’interroge, puis se manifeste le besoin d’analyse qui s’achève avec une perception juste de la réalité, et alors l’illusion décline. Le doute induit l’interrogation qui déclenche l’introspection qui mène au constat. Dans ce processus, le doute est capital.

 

Aryadeva, l’étudiant de Nagarjuna, demande aux pratiquants d’avoir trois qualités : être sans préjugés, avoir de l’intelligence et de l’inspiration. L’absence d’objectivité nous écarte de la réalité. L’aveuglement empêche l’analyse. Le manque d’enthousiasme s’oppose à la mise en œuvre. Ainsi, dès que le moindre parti pris est annihilé, utilisez votre intelligence pour l’étude des enseignements et des pratiques, et ensuite, appliquez ce que vous jugez être bénéfique. Se lancer dans la pratique du bouddhisme avec l’idée préconçue qu’il est formidable ne vous mènera pas loin. Il faut partir de la réalité telle que vous la percevez concrètement.

 

La pratique quotidienne

 

La pratique spirituelle comprend les sessions d’exercices de méditation comme ce que nous faisons dans l’intervalle des sessions : vingt-quatre sur vingt-quatre. Lorsqu’un bouddhiste se lève le matin, il pense :

 

Je consacre ma vie entière à suivre le Bouddha. Que je puisse détruire les trois poisons du désir, de la haine et de l’ignorance ! Les émotions négatives ne manqueront pas de surgir, mais je ne m’y complairai pas intentionnellement. Aujourd’hui, je ferai tout mon possible pour lire des enseignements, réfléchir sur leur sens et œuvrer à accroître la sagesse. Je ferai aussi mon possible pour générer l’intention altruiste d’atteindre l’éveil, et pour être compassionnel dans chacun de mes gestes. Que tout ce qui peut empêcher la mise en œuvre de ces pratiques s’apaise !

 

Cette pensée stimule l’apparition d’un comportement vertueux pour la journée. Alors, vous pouvez commencer vos activités quotidiennes, en n’oubliant pas de prendre un bon petit déjeuner ! Faites des aliments que vous mangez, ou des boissons que vous buvez, des offrandes au Bouddha et aux grands maîtres qui enseignent la voie vers l’éveil.

 

Puisque le mental a une tendance à désirer ce qui est agréable et, à l’inverse, déteste ce qui ne l’est pas, pour contrôler vos sens, maintenez-vous à l’écart des endroits où de telles émotions conflictuelles sont engendrées. Il est préférable pour pratiquer, si cela est possible,  de faire le choix d’un endroit isolé.  Au moment où vos capteurs sensoriels devinent des objets attirants ou laids, agissez sur le mental pour éviter qu’il tombe dans le désir ou l’aversion.

 

Pour reconnaître dans la convoitise et l’aversion des émotions autodestructrices, vous devez bien découvrir leurs aspects négatifs, puis être déterminé à les repousser. Puis prenez conscience qu’il est nécessaire de restreindre l’impact de ces émotions, et utilisez l’introspection pour comprendre que les choses et les circonstances ont une emprise sur vous, qui peut motiver le désir ou la haine. Si de tels objets ou circonstances sont manifestes, observez si des émotions aliénantes apparaissent. Vous devez être très concentré, quoi que vous fassiez à ce moment-là. Le sage Tsongkhapa dit : « Lorsque vous agissez physiquement, verbalement ou mentalement, faites-le en étant attentif à ce qui est convenable ou ce qui ne l’est pas ». La concentration et l’introspection pratiquées à chaque instant de la journée favorisent leur pleine maîtrise au cours des exercices de méditation, qui sans elle est improbable.

 

En fin de journée, vérifiez si vos actes ont été en accord avec la motivation. Réjouissez-vous des actes justes qui n’ont pas été à l’encontre de vos résolutions. Observez les actes moins satisfaisants, analysez vos erreurs avec honnêteté, reconnaissez-les franchement et générer l’intention de ne plus les répéter. Après avoir mis l’accent sur vos erreurs pour les corriger, allez vous coucher, en ayant à l’esprit le plus grand nombre d’attitudes vertueuses comme la confiance, la compassion, l’intention altruiste d’atteindre l’éveil, ainsi que la vacuité. Grâce à cela, le mental est orienté vers la vertu pendant le sommeil. Car ce repos est un moment où les tendances positives, négatives ou neutres se manifestent et qu’il faut dominer.  Voilà pourquoi, avant de s’endormir, il est crucial de créer un état d’esprit vertueux.

 

Modalités d’études

 

En général, quand vous commencez un travail de réflexion utile, vous estimez les bienfaits, le but et les résultats potentiels. La motivation doit être profonde pour arriver au terme de son exécution. La pratique d’une religion et l’étude de ses enseignements répondent aux mêmes critères. Si les bienfaits sont clairs, l’enthousiasme qu’ils engendrent pousse à étudier les enseignements et à poursuivre ensuite son étude.

 

Quels sont les aspects bénéfiques du bouddhisme ? L’étude de la pratique de la moralité définit quel comportement adopter au quotidien, c’est-à-dire renoncer à certaines choses afin de se préserver des actes négatifs. L’utilisation de la concentration méditative lors de cette pratique nous apprend à maîtriser le mental et à éviter qu’il soit trop relâché ou trop concentré. Lorsqu’il est maîtrisé, il reste sans relâche concentré sur le sujet. L’Étude de la pratique de la sagesse permet de pénétrer le sens de l’inexistence de soi, la conception erronée répandue et courante sur la nature des êtres et des choses, origine du cercle réitéré de la naissance, de la maladie et de la mort – que les bouddhistes désignent comme « cycle de l’existence » -, est annihilée. Ainsi, l’état de libération des souffrances est atteint.

 

De cette façon, assister aux enseignements et les étudier revient à se comparer :

 

  • À la lampe qui écarte les ténèbres de l’ignorance.

  • À la plus fabuleuse richesse, puisqu’elle est l’opposé de possessions matérielles, et n’attire ni les voleurs ni les agressions, ou encore, une mort prématurée.

  • À la meilleure des armes, dans ce cas, la cessation des émotions négatives, l’ignorance ennemie est probablement vaincue.

  • Au meilleur des amis, puisqu’en étudiant l’altruisme, sont apprises différentes techniques pour aider les autres à travers la pratique du don, de la moralité, et de la patience, mais aussi la manière d’attirer des élèves et de se conduire avec eux.

  • Au meilleur des compagnons, puisqu’en écoutant et en étudiant les enseignements, des qualités intrinsèques se développent sans que le bien-être extérieur s’accroisse ou diminue.

  • Au remède le moins dangereux, puisque ce développement intérieur ne met jamais en danger, à l’inverse de certains médicaments, nuisibles dans certaines conditions. Si l’on prend des cachets sans aucune nécessité par exemple.

  • À une armée, pour vaincre les émotions négatives et les résidus karmiques (empreintes d’actes négatifs) induits par elles.

  • À la suprême renommée, gloire et trésor, car grâce à eux les forces les plus favorables sont effectives pour les vies futures.

  • Au plus beaux des cadeaux, car il incite à reconnaître les avantages de la nature humaine et à les respecter.

 

Assister aux enseignements bouddhistes et les étudier sert à vaincre les trois émotions aliénantes pernicieuses, les trois poisons – le désir, la haine et l’ignorance -, et à s’engager dans les pratiques altruistes. Alors, l’état de la connaissance suprême est atteignable, et celle-ci permettra d’aider les autres sur une plus large échelle. Néanmoins, si vous assistez à des enseignements, il est indispensable de savoir les appliquer en fonction de votre capacité mentale, et, éventuellement, vous pourrez sortir de la prison du cercle des renaissances.

 

Après avoir lu ou écouter un conseil si avisé, soyez humble et assistez aux enseignements avec respect. Bouddha disait : « Écoutez bien, avec attention, et conservez l’enseignement à l’esprit. » Si, au cours de l’enseignement, le mental n’est pas attentif, cela revient à remplir un récipient le fond en l’air. L’enseignement n’aura pas imprégné le mental. Si vous oubliez ce que vous avez entendu, cela revient à remplir un récipient qui fuit. Rien ne restera dans votre esprit. Prenez des notes, c’est parfois utile.

 

L’enseignement bouddhiste est une aide pour atteindre un état libéré des émotions aliénantes. Parce que vous êtes à la recherche de solutions à vos problèmes personnels, mettez-vous dans la peau d’un être qui souffre sous l’emprise de trois maladies: le désir, la haine et l’ignorance. Votre maître est un docteur qui connaît le médicament qui agira à l’encontre de leurs tendances négatives. Ce que vous allez apprendre sera comme un remède thérapeutique.

 

Ce remède est indispensable. Pour guérir d’un mal, se contenter de trouver le médicament ou, simplement, en connaître les effets est insuffisant, il faut aussi l’avaler. Pour se débarrasser des émotions destructrices, il faut ainsi mettre en pratique les techniques pour extraire ces poisons. Les méthodes doivent s’inscrire dans votre mental qui fera corps avec la pratique.

 

L’étude de la grammaire ou de l’histoire se limite normalement à une mémorisation des règles ou d’événements précis. Le travail qui mène au développement spirituel oblige le mental à interagir avec le sens de ces enseignements. Si vous vous contentez de percevoir les enseignements comme des moyens pour cultiver le mental, un inventaire de connaissances, leur véritable impact vous échappera. La pratique constante de ces méthodes et le respect des principes sont indispensables. À la lecture d’une seule page d’un enseignement doit correspondre une inclinaison profonde vers ce qui est évoqué afin que le mental réagisse. Autrement, la compréhension des enseignements n’est qu’apparente, superficielle, et, finalement, ne servira à rien. Un peu de fierté ou de jalousie pourrait survenir chez l’étudiant, jusqu’à ce qu’il devienne hautain et querelleur! Ce résultat négatif révèle un comportement qui n’est pas en adéquation avec le fond des enseignements.

 

Dès le début, regardez les enseignements comme des guides ou des conseillers. Tsongkhapa, dans son Grand Traité de la progression vers l’éveil, dit:

 

«  En suivant les enseignements, si vous déconnectez le continuum de la conscience de ce que vous apprenez, deux parties duelles se forment, alors ce qui est enseigné ne sert à rien. Écoutez les enseignements afin de chercher à déterminer l’état de votre conscience ordinaire. Pour savoir si votre visage est sale ou présente une imperfection, vous scrutez votre visage dans le miroir pour y remédier. Au cours des enseignements, les aspects négatifs du comportement se reflètent dans les enseignements. Et vous êtes mal à l’aise, « Mon mental est ainsi! ». Pour se débarrasser de ces cotés négatifs et acquérir des qualités favorables, vous devez travailler ».

 

Lorsque la décision de refuser les émotions conflictuelles et la volonté de les éliminer du mental s’affirme, vous comprenez l’efficacité des techniques bouddhistes et, naturellement, vous manifestez de plus en plus d’intérêt à les étudier. Ces techniques vont s’imposer et se développer dans le mental, et vous souhaiterez qu’elles agissent dans celui des autres.

 

Méditation bouddhiste

 

Il existe deux types de méditation, une qui recourt à l’analyse et l’autre qui consiste à fixer son esprit sur un seul point. La première forme de méditation est désignée sous le terme de méditation analytique, la seconde sous la dénomination de stabilisation mentale. Certaines personnes pensent que l’exercice de la méditation a pour objectif de refréner l’activité de la pensée au minimum. C’est seulement une de ses formes, inutile d’ajouter qu’elle diffère grandement de la méditation analytique.

 

Méditation signifie avant tout « approfondissement »: la méditation analytique correspond à l’approfondissement de la connaissance de soi à l’aide de l’étude et de l’investigation. À l’inverse, la stabilisation mentale suppose de focaliser son esprit avec vigilance en un point déterminé grâce à l’analyse. Au cours de ce calme mental, c’est vous qui décidez de diriger l’esprit vers un objet ou une idée pour l’approfondir. Le mental se consolide alors dans un état spécifique, refoulant toute autre possibilité d’investigation.

 

La méditation analytique est indispensable, mais elle est insuffisante, seule, pour provoquer ou générer la volonté d’effectuer une transformation mentale. Pour développer le mental, déterminez les raisons qui vous y poussent et, en les découvrant au plus profond de vous-même, surgira alors le courage, doublé d’une puissante motivation. Par exemple, pour cultiver la compassion, l’émission du vœu pieux que l’ensemble des êtres vivants soient libérés de la souffrance et de ses causes est d’une grande aide, mais ce n’est pas assez. La réflexion doit porter sur les mobiles de cette compassion sous de multiples points de vue. 

 

J’aimerais maintenant vous parler d’un mode de méditation « sans pensée » pratiqué dans le Tibet d’autrefois. Au VIII siècle, au sud de la capitale Lhassa, dans le monastère de Samyé, quatre grands temples secondaires avaient été édifiés autour de l’édifice central : le Sanctuaire de la Pure moralité, dont le maître indien Santaraksita fut l’abbé et où il ordonna moines sept personnes dont les affinités à la religion bouddhistes avaient été éveillées ; le Sanctuaire de la Traduction, théâtre des travaux de traduction des soutras ; le Sanctuaire de l’Imperturbable Concentration où était pratiquer le bouddhisme chan de tradition chinoise; et le Sanctuaire des adeptes Mantrika apprivoisant les démons, pour les laïcs ordonnés dans la pratique de la voie du Tantra. Les moines chinois du Sanctuaire de l’Imperturbable Concentration utilisaient uniquement la méditation non conceptuelle, pouvant éventuellement aller jusqu’à l’absence de pensée dans le mental. À cette époque, nombre de Tibétains spirituellement engagés trouvaient que les techniques de conceptualisation posaient un problème et se convertir. À l’instar des chinois, à la méditation « sans pensée ». Le disciple de Kamalashila, Santaraksita, réfuta cette dérive lors du célèbre débat de Samyé et dans la trilogie des Étapes de la méditation.

 

Cette technique de non-conceptualisation vient probablement de Chine, et s’appuie sur une méthode traditionnelle d’étude et de réflexion contemplative. Elle est utilisée en amont de la méditation, puis quand la perception de l’absence de soi est cultivée au stade de la compréhension directe des phénomènes, le pratiquant opère une stabilisation mentale par l’absorption méditative. Or, avec le temps, le « non conceptuel » est devenu « n’avoir rien dans l’esprit ». Kamalashila rejette cette approche, et met l’accent sur l’importance de la méditation analytique, comme l’ancien sage tibétain Tsongkhapa dans son Grand Traité sur les étapes de la voie.

 

Instruments d’analyse

 

Pour le bouddhisme en général, et dans la tradition religieuse rattachée aux grandes écoles monastiques indiennes en particulier, la confiance se bâtit sur des conclusions élaborées par l’analyse. En examinant notre situation dans ce monde, où nous sommes en liens avec les autres, la compassion est engendrée. La sagesse réalisant l’impermanence est suscitée par l’analyse, comme la sagesse réalisant l’absence du soi. Du début à la fin, un état d’esprit analytique est primordial pour franchir les étapes de la voie spirituelle. La sagesse de la maturation complète de la bouddhéité exige, dès le début, d’étudier avec ferveur l’essence des choses, et de développer de plus en plus cette attitude.

 

S’arrêter à une assertion comme « le Bouddha a dit ceci » ou « mon lama a dit cela » est incongru. Référez-vous aux écrits de Nagarjuna, Aryadeva, Chandrakirti, Shantideva, Santaraksita et Kamalashila bondés d’échanges de vues et d’analyses. L’analyse et la réflexion mènent à la croyance, qui se transforme en une forte résolution de modifier notre état d’esprit et notre point de vue. Puis avec l’approfondissement ou la méditation, le mental progressivement se transforme.

 

La pratique du bouddhisme demande donc de l’intelligence. La modification ou la transformation des émotions s’obtient en utilisant l’étendue de nos capacités intellectuelles. Plutôt que de fixer le mental sur un sujet, le raisonnement ouvre la voie vers une cognition pertinente, et grâce, à ces forces les attitudes erronées, petit à petit, se dénouent. L’érudition est ici insuffisante, ce qu’il faut, c’est une mise en œuvre à un niveau de profonde conscience : la complète méditation.

 

La méditation objective et la méditation subjective

 

La méditation peut prendre deux formes, selon des considérations subjectives ou objectives. Les termes « méditer avec foi » ou « méditer avec compassion »  suggèrent une méditation dans un état d’esprit subjectif, poussant le mental a devenir compassionnel ou croyant. Or, quand il est question de méditer sur l’impermanence ou l’inexistence du soi, l’accent est mis sur une contemplation méditative objective. D’autres formes de méditation existent, comme la « méditation créative » où l’on s’impose, par exemple, de méditer sur un monde peuplé de squelettes pour combattre le désir. Vous ne pensez pas vraiment à un lieu envahi de corps décomposés, l’imagination est utilisée afin de percevoir le désir dans une perspective plus large. Quant à la « méditation réflexive », elle ouvre le mental aux qualités supérieures de la voie comme la grande compassion ou la réalisation de la vacuité. Mentalement, nous disposons d’une grande variété de pratiques, ayez-les à l’esprit même si vous n’avez pas encore accédé aux stades supérieurs. Ces techniques de méditation aident à paver la voie de la réalisation ultime.

 

Moments propices à la méditation

 

Si cela est possible, méditez quatre fois dans la journée: à l’aube, dans la matinée, l’après-midi et dans la soirée. Au pire, calez-vous sur un programme quotidien et régulier. Ceux qui travaillent ne pourront méditer que le matin et le soir. L’esprit est plus lucide le matin, pratiquer à cette période de la journée est donc une excellente chose. Moi, je trouve mon mental plus perspicace très tôt dans la matinée. Pour la durée de l’exercice, je vous recommande de le faire par courtes sessions, de quelques minutes, jusqu’à avoir une bonne maîtrise du processus méditatif. Puis, rallongez progressivement le temps de méditation.

 

Pendant vos vacances, augmentez la fréquence et la durée des exercices.

 

Sa Sainteté le Dalai-Lama

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